Comment arrêter

Pourquoi la prise en charge de l’addiction est un échec

Comment arrêter de fumer ? Comment arrêter le sucre ? Comment arrêter ?
Quelque soit le type d’addiction : sucre, écrans, jeux, sexe, travail, cigarettes, cannabis… Le focus est toujours le même : on veut arrêter.

Cette approche nous donne des résultats plus que médiocres :
70% de rechute dans les 12 mois suivant la cure de désintox pour les alcooliques¹
65%-75% de rechute dans les 12 mois suivant l’arrêt du tabac²
30%-50% de rechute sur la prise en charge des TCA³

Les chiffres font froid dans le dos et nous laissent peu d’espoir de s’en sortir.

Once an addict, always an addict.

Et pourtant, il existe une issue. Mais elle est contre-intuitive.
Qu’est-ce qui fait la différence entre quelqu’un qui rechute et quelqu’un qui s’en sort ?
Quelles sont les raisons qui font qu’aujourd’hui, la prise en charge de l’addiction se solde plus souvent par un échec qu’un succès ?

Raison 1 : l’addiction n’est pas le problème, c’est un symptôme

Nous avons tendance à considérer l’addiction comme étant le problème. Et si c’est vrai qu’elle nous pose des problèmes, elle n’est pas LE problème. Comme toutes maladies, elle trouve sa source non pas dans les molécules chimiques qui voyagent à travers notre corps mais plutôt dans le terrain psychologique où ces molécules sont bombardées. 

Comment explique-t-on qu’entre deux grands accidentés recevant de la morphine pour apaiser leur douleur, l’un d’eux reprend une vie normale à la fin de sa convalescence alors que l’autre devient accro aux opiacés et continue leur consommation bien après que son état physique soit revenu à un état de santé ?

On ne l’explique pas vraiment. Certains diront que c’est la génétique. D’autres que c’est la faute à pas de chance ou encore qu’il y avait une prédisposition à… venue de ? Mais ces réponses m’ont laissé sur ma faim alors j’ai continué à chercher. 

La différence réside dans le terrain – psychologique, émotionnel, énergétique. 

Une personne qui aime sa vie, qui se sent bien dans sa tête, bien dans son corps n’aura pas tendance à développer de dépendance, tout simplement parce qu’elle n’a rien à fuir, rien à étouffer, rien à anesthésier. 

Une autre personne qui n’aime pas trop sa vie, qui rumine des pensées qui la minent, qui se sent obligé de jouer un rôle, sera plus sujette à développer un comportement addictif parce qu’il lui permet de s’échapper, de ne plus avoir à faire face à sa réalité, d’éviter ce qui le dérange et le rend inconfortable, et d’avoir juste le temps d’un fix, accès à un paradis artificiel où il ne ressent plus rien, et surtout pas sa propre souffrance. 

L’addiction n’est pas le problème.

L’addiction n’est que le symptôme d’une déconnexion de soi, conséquence d’une profonde souffrance intérieure, qui a été enfouie tellement profondément qu’elle peut même ne pas être consciente. 

 

Trouve la souffrance et tu trouves la source de l’addiction.

Raison 2 : Absence d’une prise en charge holistique

L’addiction, ce n’est pas juste un comportement, c’est un système

Aujourd’hui, dans les approches classiques, la prise en charge de l’addiction consiste avant tout à arrêter le comportement addictif. 

  • Si tu fumes, arrête de fumer. 
  • Si tu bois, arrête de boire. 
  • Si tu joues, arrête de jouer. 

Simple mais totalement inefficace aux vues des taux de rechute. 

Ça ne prend pas en compte que l’addiction n’est pas simplement une compulsion comportementale. Elle a des impacts dans les autres sphères de notre être. 

Elle a des impacts dans la sphère physique : le comportement addictif change l’équilibre biochimique dans le corps, notamment hormonale. 

Elle a des impacts dans la sphère mentale : le comportement addictif oriente les pensées vers la recherche de satisfaction du comportement addictif mais pas que. Elle limite les capacités d’imagination et de réflexion. 

Elle a des impacts dans la sphère émotionnelle : elle permet souvent d’anesthésier l’intensité des émotions vécues mais elle génère en contrepartie honte et culpabilité. 

Et enfin, elle a des impacts dans la sphère énergétique : on pourrait voir l’addiction comme une entité tierce qui draine l’énergie vitale de la personne et crée des trous dans l’intégrité de l’enveloppe énergétique. 

Dans le meilleur des cas, et pour les addictions particulièrement sévères, la prise en charge prend en compte les sphères physique – par l’ajout d’une médication de substitution, mentales et émotionnelles – par un suivi psychologique. Mais jamais dans les approches allopathiques, on ne prend en compte la sphère énergétique qui laisse pourtant des ancrages qui ramènent l’addict vers son addiction. 

Ne pas traiter la sphère énergétique, c’est comme laisser un rappel permanent dans son inconscient. Il agit comme une bonne publicité. 

Imagine, si tu vois 50 fois dans la journée une pub pour Coca-Cola et que dans la soirée, tu as envie de boire un soda, à ton avis, quel soda penses-tu en premier et donc es-tu le plus susceptible de consommer ? 

Imagine maintenant, si tu penses, même de manière très fugace, 150 fois dans la journée à l’objet de ton addiction, de quoi vas-tu avoir envie de consommer ou faire dans la soirée pour décompresser ?

Raison 3 : Problème de la séquence de prise en charge

En prenant en compte que l’addiction s’inscrit dans un système, on peut maintenant voir un problème dans l’ordre dans lequel on s’occupe des différentes sphères. 

D’après ma propre expérience et celle que j’ai pu observer avec mon père, tous deux fumeurs, nous avons d’abord commencé par vouloir arrêter de fumer

Le problème quand on fait cela, c’est qu’on se concentre sur le fait d’arrêter. Or en  focalisant toute notre volonté sur le fait d’arrêter, l’objet de notre addiction finit par occuper toutes nos pensées.

Nous devons alors déployer encore plus d’efforts pour s’empêcher de fumer et contrôler nos pensées pour essayer de ne pas y penser

Mais tout ce contrôle génère une tension interne très désagréable qui finit par se répercuter sur la sphère émotionnelle. On est sur les nerfs, irritables. 

Cela crée une cocotte minute qui ne demande qu’à exploser, ce qui finit par arriver inexorablement. Et c’est ce qu’on appelle une rechute qui s’accompagne souvent d’une reprise encore plus intense. 

Mais avant la rechute, on fait ce que j’appelle un déplacement de l’addiction : de la cigarette aux sucettes, de la bouffe aux écrans, des jeux au sport. 

Alors oui, on me dira qu’il vaut mieux une sucette qu’une cigarette, une série qu’un beignet ou 10km à pied que 10h sur WoW. 

Ce n’est vrai qu’à court terme. Car sur le long terme, l’addiction aura toujours une conséquence néfaste pour l’addict, quelle qu’elle soit. 

De mon expérience personnelle, le déplacement de mon addiction au cannabis vers le sport s’est soldée par de multiples blessures, celle des sorties alcoolisées vers le travail par un burn out, et le tabagisme de mon père vers les sucettes par 20kg en plus et un diabète de type II. 

Ce qu’il faut se rappeler c’est que l’addiction est avant tout un mécanisme de fuite

Et notre job, c’est de sortir de ce mécanisme de fuite pour vraiment vivre et nous réaliser. 

Faire face, c’est le devoir de quiconque n’est pas imbécile ~ Victor Hugo.

Raison 4 : Ancrage identitaire

Sème un acte, tu récolteras une habitude

Sème une habitude, tu récolteras un caractère

Sème un caractère, tu récolteras une destinée

Tenzin Gyatso, 14è Dalaï Lama

Autrement dit, l’addiction devient notre identité. 

Par exemple, en fumant, on développe l’habitude de fumer et on devient un fumeur. 

En mangeant, on devient un hyperphage, un gourmand, un épicurien ou un bon vivant. 

On s’identifie à notre comportement compulsif. 

Et l’un des besoins les plus forts de tout être humain est de rester cohérent avec la personne qu’il croit être. 

Si l’on se pense fumeur, alors on agit et on pense comme un fumeur et surtout on veut le rester. 

C’est ce qui amène la plupart des addicts à être sur la défensive dès qu’on pointe du doigt leur addiction et qu’on amène l’idée de l’arrêter. 

Et qu’ils s’accrochent à leur addiction alors même qu’ils savent qu’elle est néfaste pour eux. 

Cet ancrage identitaire joue un rôle majeur dans la question de la rechute. 

Car un abstinent est toujours identifié à son addiction. 

  • La seule personne qui ne doit pas boire, c’est un alcoolique. 
  • La seule personne qui ne doit pas fumer, c’est un fumeur. 

Or si cette personne se pense addict, si les autres la pense addict, alors elle n’a pas d’autre choix que de retomber dans son addiction, à un moment ou à un autre, pour rester cohérente avec qui elle pense être.

Raison 5 : Gestion de la réexposition

Dans notre société, il est devenu quasiment impossible d’échapper à l’objet de son addiction. 

  • Que ce soit le tabac / nicotine qui se décline sous toutes les formes : cigarette, e-cigarette, tabac à chiquer, chewing-gum, patch, etc…
  • Que ce soit le sucre qui se retrouve dans tous les aliments, même les plus inattendus comme les sauces ou la charcuterie. 
  • Que ce soit les écrans devenus incontournables dans notre mode de vie, ne serait-ce que pour se connecter à son e-banking, payer ses factures, prendre un rdv… 

Tout est toujours disponible partout, tout le temps. 

Alors il est certain que l’on va être tenté à un moment ou à un autre de retoucher à son addiction. 

Le problème avec l’arrêt forcé et la manière dont on prend en charge l’addiction aujourd’hui, c’est que le moindre écart est tout de suite un drame

  • Un fumeur qui a arrêté pendant plusieurs mois et fume une cigarette fait une rechute. 
  • Un alcoolique qui a arrêté de boire pendant plusieurs mois et bois un verre fait une rechute. 
  • Un mangeur qui a arrêté le sucre pendant plusieurs mois et mange un dessert fait une rechute. 

Le drame de la rechute est en lien direct avec l’ancrage identitaire. 

C’est un drame pour un fumeur, qui a arrêté, de fumer une cigarette après son arrêt. 

Mais ce ne serait pas un drame pour un non-fumeur de fumer une cigarette, une fois. 

La réexposition, couplée à l’ancrage identitaire, crée la possibilité de rechute. La culpabilité, la honte et  le sentiment d’échec en cas de consommation finissent d’ancrer la rechute.

Conclusion : Tu n’arrives pas à arrêter et c’est bien normal. 

Si je résume, les 5 raisons pour lesquelles il est quasiment impossible de s’en sortir sont :

  1. L’addiction est vue comme le problème à traiter et non comme un symptôme. C’est comme si tu voulais traiter une pneumonie en faisant tomber la fièvre avec du doliprane, sans penser à donner des antibiotiques pour flinguer les bactéries qui causent l’infection. C’est cool, tu as caché la merde au chat mais ça continue de puer et à pourrir. 
  2. Une prise en charge partielle qui travaille en surface et ne prend pas en compte toutes les dimensions de l’être. 
  3. Une erreur dans la séquence de prise en charge qui conduit au déplacement de l’addiction et à la rechute. 
  4. L’ancrage identitaire qui ramène toujours l’addict à son addiction. 
  5. La dramatisation de la réexposition qui s’accompagne de culpabilité, de honte et un fort sentiment d’échec qui se traduit par une rechute. 

C’est donc toute la prise en charge de l’addiction qui est à revoir et à repenser. 

La manière dont on veut arrêter les addictions aujourd’hui repose sur des leviers comme la restriction et la culpabilisation, ce qui s’avèrent toujours inefficaces et contreproductifs à moyen-long terme. 

Heureusement, d’autres approches sont en train de voir le jour et de se diffuser, notamment grâce aux avancées en psychologie et en neuropsychologie, mais aussi grâce à la redécouverte des traditions anciennes comme le chamanisme qui englobent toutes les sphères de l’être.